Press release | 7 Mai 2020

LES GOUVERNEMENTS ET LES ENTREPRISES DOIVENT SANS PLUS TARDER SOUTENIR LES DÉFENSEURS DES DROITS FONCIERS ET ENVIRONNEMENTAUX AFIN QU’ILS PUISSENT CONSTRUIRE UN AVENIR PLUS RÉSILIENT ET PLUS ÉQUITABLE POUR NOUS ET NOTRE PLANÈTE

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Le monde tel que nous le connaissons est en train de changer à une allure exponentielle. L’impact du Covid-19 sur les systèmes sanitaires et financiers mondiaux se fera sentir pendant des décennies. Alors que la première des priorités restera le maintien de la vie et des moyens d’existence, le virus continuera de se manifester sous de nombreuses formes à court, moyen et long terme.

Chez Global Witness, nous nous engageons à faire partie du mouvement en faveur d’une planète plus résiliente. À ce titre, nous prenons fait et cause pour les militants qui défendent les droits fonciers et environnementaux. Il faut que les États et les entreprises en fassent autant.

En effet, ils ont tout à y gagner : il est largement reconnu que la déforestation et la perte de la faune sont deux facteurs clés de l’augmentation des maladies infectieuses. Afin d’éviter une nouvelle pandémie, les décideurs devront écouter les environnementalistes, les chefs autochtones et les activistes des communautés qui prennent position en faveur de la protection de la nature. Les activistes qui œuvrent en première ligne peuvent aussi être transmettre un message primordial contre les inégalités qui ont exacerbé l’impact du virus et proposer des pratiques commerciales plus durables à l’avenir. Mais uniquement à condition de pouvoir agir sans se mettre en danger.

AGGRAVATION DES MENACES

Comme c’est le cas d’autres types de défenseurs des droits humains, les menaces et les attaques visant les activistes des secteurs du foncier et de l’environnement n’ont pas diminué pendant cette période de crise du Covid-19. Elles semblent même s’être intensifiées. Depuis la Colombie jusqu’au Niger, en passant par l’Indonésie ou les Philippines, Global Witness et ses alliés ont reçu des rapports fiables concernant les événements suivants :

  • Des défenseurs ont été confinés dans un lieu connu puis ciblés, voire assassinés, par des groupes armés étatiques et non étatiques.
  • Des tribunaux ont été suspendus et des audiences ont eu lieu à huis-clos, des défenseurs incriminés se retrouvant sous les verrous pendant de longues périodes avec un recours juridique limité.
  • Des mesures draconiennes ont été introduites pour limiter la liberté d’expression, notamment des mesures de censure – qui ont par la suite été appliquées aux personnes arrêtées pour avoir défendu leurs droits fonciers ou environnementaux.
  • Des gouvernements se sont servis du Covid-19 pour stopper des manifestations, même dans des pays où la présence du virus n’avait pas été enregistrée ou dans lesquels les manifestants observaient les règles de distanciation sociale.
  • Les défenseurs des droits ont fait l’objet d’une surveillance et de mesures d’intimidation accrues, sous prétexte de pouvoirs spéciaux en situation d’urgence.

Les peuples autochtones se situent au premier plan de la bataille contre le dérèglement climatique. Cependant, ils sont également disproportionnellement vulnérables au Covid-19 – les gouvernements négligeant leurs besoins en matière de soins de santé, et des mineurs et des exploitants forestiers illégaux s’introduisant sur leurs territoires sans prendre la moindre précaution, risquant ainsi de propager la maladie.

Étant donné que les activités d’une majorité d’ONG et de nombreux mouvements sociaux soient menées en ligne pendant le confinement, les craintes relatives à la sécurité numérique – ainsi qu’au bien-être psychologique – sont bien réelles. De nombreux défenseurs populaires sont contraints de se consacrer en priorité à leur lutte quotidienne pour la survie, leurs emplois et moyens de subsistance se trouvant menacés, ce qui les empêche de manifester et de s’organiser.

Sans exception, les défenseurs des droits sont préoccupés par la perspective que les pouvoirs d’urgence très généraux mis en œuvre pour endiguer et faire face à ce virus meurtrier puissent être employés à mauvais escient afin de réprimer l’activisme, réduire les libertés civiques et cibler les individus qui défendent leurs droits. Les réponses introduites en réponse au Covid-19 sont déjà appliquées de manière inégale à l’encontre des activistes : tandis que des gouvernements libèrent des prisonniers pour réduire le risque de contagion dans les prisons, il est fréquent que les défenseurs détenus restent enfermés.

Les activistes à haut risque ne reçoivent pas toujours le soutien qu’il leur faudrait. Les gouvernements, les diplomates, les donateurs et les entreprises responsables doivent faire preuve de créativité et d’engagement afin de trouver des moyens de s’associer aux défenseurs menacés, de les soutenir et de les protéger, sans propager le virus.

STATU QUO ET CRAINTES POUR L’AVENIR

Alors que les activistes doivent faire face à ces nouvelles restrictions, certaines entreprises ont profité du manque relatif de contrôle exercé par les acteurs civiques pour poursuivre des opérations controversées et réclamer l’adoption de réglementations assouplies et de demandes d’autorisation accélérées. De tels comportements ne peuvent que renforcer les causes profondes existantes des risques auxquels les défenseurs doivent faire face. Les gouvernements ne devraient pas défendre un comportement opportuniste alors même qu’une crise internationale sévit ; ils devraient s’engager à insuffler un nouvel élan économique pour l’après-Covid-19 qui s’appuie sur une base solide de droits humains et de protections environnementales.

Pour être durable, résiliente et équitable, la réponse à cette pandémie devra veiller à respecter les droits et s’assurer que ceux qui les défendent sont entendus. Cependant, des éléments semblent indiquer que certains pourraient s’engager sur une voie opposée : aux États-Unis, le gouvernement fédéral a allégé l’application des lois environnementales, une poignée d’États ayant simultanément fait des manifestations pour la défense de l’environnement un délit pénal.

La société civile doit faire preuve de vigilance.

LA SOCIÉTÉ CIVILE RÉAGIT, MAIS LES GOUVERNEMENTS ET LES ENTREPRISES EN FERONT-ILS AUTANT?

Il est encourageant de constater que, malgré le renforcement des pressions et des restrictions, les organisations environnementales et de défense des droits humains à travers le monde conjuguent actuellement leurs efforts pour trouver des réponses innovantes et réunir des documents pertinents. Global Witness participe à l’initiative mise en place par la Defending Land and Environmental Defenders Coalition visant à assurer un suivi systématique des incidents liés au Covid-19 et à en identifier les tendances. Les ONG surveillent les menaces qui pèsent sur les libertés civiles et l’impact du Covid-19 sur les peuples autochtones, ainsi que les réponses apportées à la crise par le monde des entreprises et l’ONU.

Non seulement les droits à la santé et les droits des travailleurs font face à un risque considérable lorsque les activistes ne peuvent en assurer un contrôle adéquat parce qu’ils font eux-mêmes l’objet de menaces, mais si nous tenons à construire une planète plus résiliente et plus équitable une fois cette crise terminée, il est crucial de mieux protéger les défenseurs des droits fonciers et environnementaux. Ceux-ci se trouvent au premier plan de la bataille contre le dérèglement climatique, et ils jouent un rôle clé dans l’instauration d’une reprise économique verte à travers le monde – en stoppant les dégâts causés à l’environnement qui est justement censé nous protéger des maladies infectieuses, et en tenant tête aux entreprises irresponsables qui cherchent à tout prix à dégager des bénéfices. 

À long terme, il est impératif que nous réfléchissions à la manière dont les entreprises responsables peuvent fonctionner tout en plaçant les communautés et les défenseurs locaux au cœur des processus décisionnels, plutôt qu’en les mettant en danger. Global Witness a publié récemment des directives à cet effet à l’attention des entreprises et des investisseurs.

À court terme, les gouvernements et les entreprises devraient :

  • Recourir à des communications publiques et privées pour souligner que le rôle des défenseurs des droits fonciers et environnementaux est plus important que jamais et que les actes de représailles à leur encontre ne sauraient être tolérés.
  • Octroyer des ressources à l’identification d’une hausse des risques de représailles à travers les investissements, les opérations et les chaînes d’approvisionnement, agir pour empêcher et atténuer tout risque, et soutenir les défenseurs des droits fonciers et environnementaux à travers le monde.
  • Utiliser des moyens sécurisés pour que l’information sur l’impact des projets commerciaux en termes de droits humains ou environnementaux parvienne jusqu’aux personnes affectées, en leur donnant la possibilité de participer au processus décisionnel sans courir de risque.
  • S’engager à placer les droits fonciers et environnementaux, et leurs défenseurs, au cœur de toute réponse apportée au Covid-19.

/ Fin

Covid-19 Crisis

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