Communiqué de presse / 10 Mai 2010

L'exportation massive de millions de tonnes de sable du Cambodge vers Singapour menace l'environnement, révèle un nouveau rapport de Global Witness

Selon un nouveau rapport publié aujourd'hui par Global Witness, l'expansion rapide de Singapour a donné naissance au Cambodge à une industrie du dragage du sable dévastatrice sur les plans écologique et social. Ce commerce florissant est monopolisé par deux sénateurs cambodgiens très en vue et proches du Premier ministre Hun Sen, malgré une prétendue interdiction gouvernementale frappant l'exportation de sable.

Le rapport de Global Witness « Shifting Sand: how Singapore's demand for Cambodian sand threatens ecosystems and undermines good governance » (Déplacement de sable : les impacts négatifs de la demande de Singapour pour le sable cambodgien sur l'écosystème et la bonne gouvernance) révèle que :

  • Les sénateurs cambodgiens Mong Reththy et Ly Yong Phat se sont vus octroyer en catimini des permis d'extraction de sable qui leur donnent le contrôle d'une industrie générant des millions de dollars. Il n'existe cependant aucune preuve qu'une quelconque fraction de ces revenus ne vienne gonfler les caisses de l'État cambodgien. Ces deux sénateurs ont été impliqués dans des ventes douteuses de terre et des expulsions forcées et, récemment, ils ont été critiqués pour avoir soutenu financièrement des unités des forces armées cambodgiennes. Cette situation semble confirmer la mainmise croissante de l'élite kleptocratique cambodgienne sur les ressources naturelles du pays, reproduisant ainsi le modèle de corruption, de copinage et de violation des droits déjà observé dans le secteur forestier et les industries extractives.
  • L'industrie du dragage du sable au Cambodge compromet fortement le milieu côtier, en menaçant les espèces en voie de disparition, le stock halieutique et les moyens de subsistance de la population locale. Rien ne laisse paraître que des mesures de protection basiques en matière d'environnement aient été appliquées ni que les autorités locales aient été consultées par rapport aux mouvements continus de bateaux et au dragage du sable, souvent dans des zones protégées. De ce fait, la supposée interdiction gouvernementale de mai 2009 relative au dragage du sable devient un objet de risée.
  • Ce commerce est dirigé par Singapour. La Cité-État fut le principal importateur mondial de sable en 2008. Depuis les années 1960, elle a largement recouru aux importations de sable pour augmenter sa masse terrestre de 22%. Ce projet a ravagé les littoraux dans cette région du globe et, en raison de préoccupations d'ordre environnemental, la Malaisie, le Vietnam et l'Indonésie viennent tous trois d'annoncer l'interdiction du dragage de sable destiné à l'exportation.

« Cette situation souligne l'échec continu des donateurs internationaux du Cambodge à exercer leur influence pour demander des comptes au petit groupe élitiste entourant le Premier ministre », déclare George Boden, militant chez Global Witness. « La richesse en ressources naturelles du Cambodge devrait aider la population à sortir de la pauvreté. Au lieu de cela, l'aide internationale a soutenu les services de base du Cambodge depuis plus de 15 ans, en fournissant l'équivalent de 50 % du budget gouvernemental. En attendant, l'argent dégagé par l'exploitation des ressources naturelles garnit des comptes bancaires privés et près de 70 % de la population subsistent avec moins de 2 dollars américains par jour. »

L'enquête de Global Witness a suivi la trace des bateaux chargeant du sable au Cambodge jusqu'à leur destination à Singapour. Elle a, en outre, dévoilé des contrats liant des sociétés singapouriennes à l'industrie cambodgienne du sable. Au mois de juin cette année, Singapour hébergera le Sommet mondial des villes (World Cities Summit) qui a pour vocation de promouvoir « le développement durable et la qualité de la vie dans les villes ».

« Singapour affirme que l'importation de sable est une activité purement commerciale, mais la Cité-État se présente également comme le chef de file régional en matière de questions environnementales », poursuit George Boden. « Le fait que le pays ne réussisse pas à minimiser les coûts sociaux et écologiques du dragage du sable est de l'hypocrisie à grande échelle. Si Singapour souhaite que sa position environnementale soit prise au sérieux, elle devrait logiquement commencer par contrôler la provenance du sable et la façon dont il est extrait. »

/FIN DU COMMUNIQUÉ

Contact : George Boden au +44 (0)207 492 5899 ou au +44 (0)7912 516445 ou Oliver Courtney (français) au +44 (0)207 492 5848 ou au +44 (0)7815 731 889, [email protected].