Press release | 3 Octobre 2016

Un fonds spéculatif condamné à verser 413 millions $ pour faits de corruption : un important pas en avant dans la lutte contre la corruption – réaction de Global Witness

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Les efforts considérables déployés pour exiger des entreprises qu’elles répondent des actes de corruption dont elles se rendent responsables à l’étranger viennent de donner des résultats probants, le ministère américain de la Justice et la Securities and Exchange Commission (SEC) ayant ordonné au fonds d’investissement spéculatif new-yorkais Och-Ziff de verser 413 millions de dollars pour atteintes à la loi américaine sur la corruption, le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA). La société mère a conclu un accord de poursuites différées, tandis qu’une filiale plaidait coupable aux accusations de corruption. Deux cadres de la société, Daniel Och, son fondateur, et Joel Frank, son directeur financier, ont également convenu de conclure un règlement financier.

« Il s’agit de l’une des amendes les plus élevées jamais imposées pour atteinte à la loi FCPA, et cela constitue un pas en avant important pour la démarche visant à exiger des grandes entreprises corrompues qu’elles rendent compte de leurs actes. C’est en versant des pots-de-vin qu’Och-Ziff a pu profiter de contrats miniers et pétroliers, dont certains ont privé l’un des pays les plus pauvres du monde d’argent qui aurait pu servir à construire des écoles et à financer des hôpitaux. Il est donc normal qu’elle rende des comptes », a commenté Pete Jones, chargé de campagne à Global Witness. « Mais cela ne doit pas être une simple question d’amendes : les individus derrière ces contrats frauduleux doivent répondre de leurs actes et être emprisonnés le cas échéant. »

« Les entreprises détenues par des entités anonymes ont joué un rôle majeur en contribuant à la conclusion de certains des accords les plus préjudiciables du dossier Och-Ziff », a ajouté Pete Jones. « Nous avons constaté à maintes reprises que des acteurs d’entreprises corrompus se servent de compagnies détenues dans l’anonymat pour déguiser des paiements et voler les bénéfices. Les preuves avancées dans le dossier Och-Ziff montrent une fois de plus que si nous tenons réellement à mettre un terme à la corruption et à ses effets préjudiciables, il nous faut également veiller à empêcher la création de ce type d’entreprises détenues par des entités anonymes. »

Certaines des principales atteintes constatées dans le dossier Och-Ziff concernent des contrats conclus en République démocratique du Congo mis en évidence par Global Witness et des journalistes et sur lesquels ils enquêtaient depuis 2011. Dans le cadre de ses contrats congolais, Och-Ziff a financé le milliardaire israélien et magnat du pétrole Dan Gertler lors de son acquisition d’entreprises et d’actifs miniers et pétroliers. Une « part significative » des prêts versés à « un homme d’affaires israélien… partenaire en RDC » d’Och-Ziff a servi « à verser des pots-de-vin à des hauts fonctionnaires de la RDC afin d’obtenir des actifs miniers pour Och-Ziff et son partenaire », d’après un document publié par la SEC. Global Witness a publié de nombreuses preuves des risques de corruption inhérents aux contrats conclus au Congo par Gertler, ami intime du Président Joseph Kabila.

Gertler nie avoir commis un quelconque acte préjudiciable dans le cadre de ses transactions commerciales au Congo. Son porte-parole a affirmé avant la publication du document de la SEC que le dossier Och-Ziff n’avait « rien à voir avec Fleurette [la société de Gertler] ».

« Le règlement conclu aujourd’hui sur le dossier Och-Ziff soulève des questions supplémentaires auxquelles les autres partenaires clés de Gertler au Congo se doivent de répondre, et notamment Glencore, géant des matières premièrecoté à la bourse de Londres », a commenté Pete Jones. « La société minière kazakhe ENRC, qui a obtenu des actifs congolais en partenariat avec Gertler, fait l’objet d’une enquête du bureau des fraudes britannique, le Serious Fraud Office (SFO), depuis 2013, suite à des exposés de Global Witness et de journalistes. Les autorités britanniques doivent désormais trancher sur la question de savoir s’il convient de traduire ENRC en justice de manière formelle pour ses actes. »

L’action Och-Ziff a chuté de 41 % au cours des sept premiers mois de 2016 et, vu les enquêtes pour corruption présumée toujours en cours, Och-Ziff a eu du mal à rassurer ses investisseurs. Och-Ziff constituait autrefois un investissement extrêmement attractif pour les fonds publics de retraite et d’autres investisseurs institutionnels, mais aujourd’hui, au moins deux de ses investisseurs ont cédé leurs actifs, invoquant les affaires de corruption comme facteur dans leur décision. Le plan de retraite de Goldman Sachs Group Inc. serait le dernier en date à avoir liquidé 350 millions de dollars de titres détenus dans Och-Ziff. Même une fois cette affaire réglée, il est probable qu’Och-Ziff doive continuer à répondre à ses actionnaires devant un tribunal new-yorkais[i] concernant des accusations portées par des investisseurs selon lesquelles la société a tenu des propos trompeurs sur ses contrats en Afrique et s’est abstenue de divulguer des faits importants.



[i] Menaldi v Och-Ziff Captial Management Group LLC et al, U.S. District Court, Southern District of New York, No. 14-03251.

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Contacts

Infos pour les journalistes:

1. L’enquête sur les pots-de-vin de la société Och-Ziff est de très grande ampleur : elle a porté sur des cas de corruption en Libye, au Tchad, au Niger, en Guinée et en République démocratique du Congo.

2. En 2008, Och-Ziff a conclu un accord de joint-venture, Africa Management Limited (AML), qui employait un « arrangeur » gabonais, Samuel Mebiame. Mebiame aurait versé des pots-de-vin à des agents gouvernementaux afin d’obtenir des droits miniers dans plusieurs pays africains. Les autres entreprises formant AML étaient Mvelaphanda Holdings, société sud-africaine fondée par Tokyo Sexwale, homme d’affaires sud-africain de premier plan et chef de file politique de la lutte anti-apartheid, et Palladino Holdings, société secrète des îles Turques et Caïques. Palladino appartenait à Olaf Walter Hennig, homme d’affaires sud-africain sujet à controverse.

3. En plus du joint-venture qu’Och-Ziff a constitué avec la société des îles Turques et Caïques Palladino Holdings, le fonds spéculatif servait également à acheminer des capitaux jusqu’au milliardaire israélien Dan Gertler, démarche qui aurait été menée à bien par le biais de compagnies détenues de manière anonyme et constituées dans les îles Vierges britanniques et dans les îles Caïmans. Les conclusions de la SEC concernant Och-Ziff indiquent que le fonds spéculatif a « conclu un partenariat [avec] un homme d’affaires israélien tristement célèbre » qui s’est servi de prêts émanant de Och-Ziff pour, en partie, corrompre des hauts fonctionnaires congolais.

4. Le rapport de Global Witness paru en mai 2016 intitulé « Hors d’Afrique » indiquait également que des contrats miniers et pétroliers conclus dans le secret au Congo et impliquant Gertler avaient fait perdre au Trésor public des revenus potentiels de 1,5 milliard de dollars. Une partie des revenus d’au moins un de ces contrats a servi à contribuer à un fonds électoral en vue de l’élection présidentielle de 2011, remportée par le Président Joseph Kabila, ami de Gertler. Kabila se livre actuellement à une lutte acharnée pour rester au pouvoir, la Constitution l’ayant contraint à quitter ses fonctions. Les manifestations contre son régime des 19 et 20 septembre se sont soldées par d’importantes violences, lors desquelles jusqu’à 50 civils auraient été tués par la police et l’armée et les quartiers généraux de partis politiques ont été incendiés.

5. Depuis l’ouverture en avril 2013 de l’enquête du SFO sur ENRC, la société a été radiée de la bourse de Londres et opère désormais sous le nom de ERG (Eurasian Resources Group).

6. Le film When Elephants Fight, soutenu et commenté par l’actrice lauréate du Golden Globe Robin Wright, montre comment des sociétés détenues dans l’anonymat par Dan Gertler ont à maintes reprises reçu des actifs miniers congolais à des prix imbattables, avant de les revendre en réalisant des profits colossaux, aux dépens de l’État congolais.

7. Daniel Och, fondateur d’Och-Ziff, a fourni aux médias le commentaire suivant concernant les amendes : « Cet épisode a été profondément décevant. Ce comportement n’est pas conforme à nos valeurs fondamentales et n’est pas représentatif de nos centaines de salariés à travers le monde qui se consacrent à servir nos clients avec la plus grande intégrité. Nous avons tiré des enseignements de cette expérience et pris des mesures significatives pour renforcer Och-Ziff. Nous sommes heureux de régler cette question et restons axés sur la génération de rendements pour nos Fonds. »

8. Glencore a également nié tout agissement préjudiciable dans le cadre de ses transactions avec Gertler et nous ne présumons pas que cette société soit liée à l’affaire Och-Ziff.


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