Press release | 5 Juin 2017

Un rapport révèle que l’économie et les habitats naturels uniques de l’Ouganda sont menacés par la corruption endémique et la mauvaise gestion

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  • Près de la moitié des dernières populations de gorilles de montagne du monde est en péril alors que l’exploration minière menace quelques-uns des environnements de la planète les plus riches en biodiversité;
  • Les mineurs travaillent dans des conditions dangereuses et en grande partie non réglementées – les enfants sont exposés quotidiennement à des produits chimiques toxiques ;
  • Le pays est privé d’investissements et de revenus fiscaux dont il a tant besoin et qui pourraient bénéficier aux écoles, aux hôpitaux et aux routes ;
  • Des minerais de la République démocratique du Congo et du Soudan du Sud qui pourraient financer les conflits et les violations des droits de l’homme se retrouvent dans les chaînes d’approvisionnement mondiales en passant par l’Ouganda.

Londres/Kampala, le 5 juin 2017 : La corruption qui sévit dans le secteur minier ougandais permet à des fonctionnaires véreux et aux investisseurs auxquels ils s’associent de tirer des profits au détriment de l’économie, de la population et de l’environnement du pays, révèle Global Witness aujourd’hui.Une enquête de 18 mois montre qu’il est presque impossible de faire des affaires dans le secteur minier sans verser de pots-de-vin ou sans bénéficier de contacts politiques en haut lieu.

‘Undermined’ (‘Mis à mal’) décrit comment des individus ayant des contacts en haut lieu – notamment ceux qui entretiennent des liens étroits avec le président – semblent échanger l’influence politique dont ils bénéficient contre des avantages financiers. Des fonctionnaires subalternes aux personnalités politiques de premier plan, beaucoup de ceux impliqués dans le secteur sont prêts à contourner ou à enfreindre les règles. Les intermédiaires et les médiateurs dirigent une économie parallèle en marge du système, soldant les droits miniers à travers tout le pays dans le cadre de contrats facilités par des employés du Département des Mines. Les investisseurs sérieux sont chassés, alors que les derniers qui devraient être autorisés à opérer dans l’industrie minière figurent précisément parmi ceux qui restent.

« Les preuves sont accablantes – Le secteur minier ougandais repose sur une économie parallèle qui favorise fortement des sociétés malhonnêtes et des élites corrompues au détriment de la population et de l’environnement. L’effroyable mauvaise gestion du secteur alarmera autant les investisseurs que les militants des droits de l’homme et les défenseurs de l’environnement, » a déclaré George Boden, responsable de l’Équipe Ouganda de Global Witness. « Nous détenons des preuves de marchés attribuant des permis d’exploration minière dans des sites classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, de firmes dirigées par des jeunes britanniques dans la vingtaine qui reçoivent des licences en l’espace de quelques jours, et d’enfants travailleurs qui manipulent des produits chimiques dangereux dans des mines d’or à haut risque. Pris individuellement, ces cas sont profondément choquants. Pris dans leur ensemble, ils illustrent de façon éclatante le besoin de réformes immédiates et profondes. »

‘Undermined’ décrit de nombreux cas liés à ces problèmes, notamment :

  • Des permis d’exploration minière ont été octroyés dans presque toutes les zones protégées d’Ouganda,  y compris les sites de renommée mondiale de Bwindi et de Rwenzori classés au patrimoine mondial de l’UNESCO  et une partie du célèbre écosystème des Virunga, qui abrite les dernières populations de gorilles de montagne de la planète. Cela représente également une sérieuse menace pour l’industrie ougandaise du tourisme que le gouvernement s’emploie à promouvoir au niveau international et qui s’avère cruciale pour l’économie du pays.
  • Des mineurs, dont des enfants, opèrent dans des conditions dangereuses et en grande partie non réglementées et sont exposés quotidiennement à des substances toxiques telles que le mercure. Des puits de mine mal creusés s’effondrent régulièrement, faisant des morts et des blessés graves.
  • Des droits miniers sont régulièrement octroyés à des personnes ou des sociétés qui ne sont pas qualifiées pour exploiter les mines. Ainsi, African Panther Resources a obtenu le contrôle d’une concession minière d’étain dans le sud-ouest de l’Ouganda alors que la firme était détenue par deux jeunes britanniques dans la vingtaine qui ne disposaient apparemment d’aucune expérience dans l’exploitation minière. Ils ont obtenu une licence d’exploration pour le site en l’espace de trois jours, un délai qu’un employé du Département des Mines a qualifié d’ « impossible » à Global Witness. La société n’était dans leurs mains que depuis sept mois. Avant et après cette période, elle était contrôlée par Christopher Eibl, CEO de la grande firme internationale suisse d’investisseurs en matières premières Tiberius Asset Management, et ses partenaires commerciaux. Les changements de propriétaires semblent être une tentative manifeste de dissimuler leur identité pendant la période au cours de laquelle la compagnie a obtenu sa licence.
  • Parmi les nombreux exemples d’évasion fiscale légale mais abusive, l’African Gold Refinery (AGR), dont les employés ont des liens étroits avec le président, a déclaré des exportations d’or d’une valeur supérieure à 200 millions $US mais n’a payé qu’un demi-million de dollars d’impôts. Un ancien employé ayant des contacts avec le président ougandais a révélé comment il avait contribué à mettre au point les exonérations d’impôts dont a bénéficié la firme, laquelle exploite de l’or provenant de toute la région, y compris du Soudan du Sud et de RDC. La compagnie n’a pas divulgué l’origine de l’or ni fourni d’éléments prouvant qu’elle exerçait un devoir de diligence sur sa chaîne d’approvisionnement, faisant craindre que cet or n’alimente les conflits et les violations des droits de l’homme. 

« L’Ouganda se trouve à la croisée des chemins. Gérées correctement, ses richesses minérales pourraient créer des emplois et générer des revenus dont le pays a tant besoin. Mais si rien n’est fait pour endiguer ce degré de corruption et de mauvaise gestion, seules les élites politiques et les corrompus en profiteront. En attendant, les Ougandais continuent à perdre leurs terres et leurs moyens de subsistance, les firmes jouissant d’une bonne réputation mettent en veilleuse leurs investissements et l’environnement souffre, » a conclu George Boden.

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