Press release | 4 Mai 2016

Des contrats miniers secrets risquent à nouveau de financer les élections au Congo : Global Witness tire la sonnette d’alarme

Lire ce contenu en:

English

Les profits tirés de contrats miniers secrets risquent de financer illégalement la campagne pour l’élection présidentielle controversée qui aura lieu cette année en République démocratique du Congo, a déclaré Global Witness dans un nouveau rapport publié aujourd’hui. Cet avertissement vient alors que des dirigeants mondiaux se préparent à arriver au Royaume-Uni la semaine prochaine pour un grand sommet anti-corruption.

L’inquiétude de Global Witness se fonde sur des preuves provenant des élections congolaises précédentes, à l’occasion desquelles six contrats miniers et pétroliers occultes ont fait perdre au Congo 1,5 milliard de dollars – soit le double des dépenses annuelles du pays consacrées à la santé et à l’éducation. Une partie des produits des ventes a été utilisée pour contribuer à un fonds gouvernemental destiné au scrutin de 2011. Le reste est passé dans des mains privées, privant le peuple congolais de l’argent dont il a tant besoin pour les hôpitaux, les écoles et les infrastructures routières.

Chacune de ces six transactions a impliqué des sociétés anonymes immatriculées aux Îles Vierges britanniques (IVB) et liées au milliardaire israélien Dan Gertler, un ami proche du Président congolais en difficulté Joseph Kabila, lequel est parvenu à remporter le scrutin de 2011 en dépit d’accusations de bourrage des urnes et d’intimidations à l’encontre d’opposants. La constitution congolaise impose aux présidents une limite de deux mandats de cinq ans ; Kabila, qui a également remporté l’élection de 2006, est censé se retirer cette année. Cependant, les analystes le soupçonnent de vouloir essayer de reporter les élections, voire de modifier la constitution afin de pouvoir briguer un troisième mandat.

Depuis 2015, de nouveaux contrats miniers ont été conclus, augmentant le risque de détournement de fonds provenant de ventes d’actifs miniers pour financer les efforts déployés par Kabila en vue de se maintenir au pouvoir. Une transaction non annoncée pour l’exploitation d’une mine de cuivre, impliquant la société minière publique congolaise, a été conclue au début de l’année 2015 avec Glencore et le Groupe Fleurette appartenant à Gertler, mais elle n’a été révélée par la presse que plusieurs mois plus tard, tandis qu’un gigantesque accord potentiel avec la China Nonferrous Metal Mining Co., annoncé en juillet 2015, n’a pas encore été publié.

« Avec la bataille politique acharnée qui se profile à l’horizon, le risque existe que de nouveaux contrats secrets soient conclus au Congo et qu’une partie des profits découlant de ces transactions soit versée dans des fonds clandestins et utilisée pour influencer ou reporter les élections », a expliqué Nat Dyer, chef de l’équipe en charge du Congo à Global Witness. « Pour éviter que cela ne se produise, le Congo doit publier des informations complètes sur toutes les ventes de ressources naturelles, notamment des renseignements sur les bénéficiaires réels des sociétés impliquées. »

Au cours de la période précédant et suivant les élections de 2006 et 2011, le magnat de l’exploitation minière Gertler a obtenu des actifs miniers et pétroliers à des prix souvent bien inférieurs à la valeur du marché, concluant ensuite des transactions lucratives sur ces actifs avec des sociétés telles que le géant du commerce des matières premières Glencore, une entreprise cotée à la Bourse de Londres. Gertler est accusé d'avoir tiré profit de ces contrats au détriment de l'État congolais. Selon Haaretz, son nom apparaît également plus de 200 fois dans les Panama Papers, des documents sur les sociétés offshore qui ont fait l’objet de fuites.

La semaine prochaine, le Premier Ministre britannique David Cameron accueillera des dirigeants mondiaux au Royaume-Uni à l’occasion d’un grand sommet anti-corruption. Les contrats décrits dans le rapport de Global Witness ‘Hors d’Afrique’ montrent les préjudices causés par l’opacité garantie aux sociétés offshore enregistrées dans les territoires sous contrôle britannique. Le Royaume-Uni doit maintenant montrer la voie dans la lutte contre ce problème en obligeant ses paradis fiscaux offshore à instaurer des registres publics de propriétaires effectifs afin que nous puissions découvrir qui a réellement bénéficié de ces transactions.

« Les contrats que nous analysons dans ‘Hors d’Afrique’ ont généré d’énormes profits pour les sociétés immatriculées aux IVB au détriment du peuple congolais. La liste complète des bénéficiaires réels de ces sociétés des IVB demeure secrète grâce aux réglementations de ce territoire offshore. Le seul moyen d’éradiquer de telles pratiques est de mettre fin à l’opacité du monde offshore, en particulier dans les territoires britanniques d’outre-mer et les dépendances de la Couronne », a souligné Nat Dyer.

M. Gertler conteste vigoureusement les diverses accusations portées à son encontre, les qualifiant de « fausses et non fondées ». Son porte-parole a déclaré que ses opérations commerciales étaient totalement transparentes et avaient contribué à stimuler la croissance économique au Congo. Glencore a également nié toute malversation

 

/ Fin

Contacts

Cela pourrait aussi vous intéresser :

  • Rapport

    Hors d’Afrique

    Les paradis fiscaux britanniques et le milliard et demi de dollars disparu du Congo
    GettyImages-157749818.jpg