Press release | 30 Août 2017

Seule la moitié des exportateurs de minerais des Grands Lacs africains ont publié un rapport sur leurs efforts en matière d’approvisionnement responsable – nouveau rapport de Global Witness

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Selon une nouvelle étude de Global Witness, moins de la moitié des entreprises officiellement enregistrées comme exportatrices de minerais de la République démocratique du Congo, du Rwanda et de l’Ouganda ont publié un rapport sur l’exercice de leur devoir de diligence en 2015. « L’heure de creuser plus profondément » est la toute première analyse circonstanciée des rapports publics sur le devoir de diligence appliqué à la chaîne d’approvisionnement dans la région.

Le devoir de diligence a été introduit en réponse aux liens bien établis entre le commerce des minerais, les violations des droits de l’homme et le financement des conflits qui touchent certaines parties de la région des Grands Lacs et d’autres régions. Pour les entreprises qui exportent certains minerais du Congo et du Rwanda, le devoir de diligence est obligatoire en vertu des législations nationales de ces deux pays.

« Les revenus de millions d’habitants dépendent de l’exploitation minière artisanale difficile et souvent dangereuse. Mais trop nombreux sont ceux qui sont exposés quotidiennement à des atteintes aux droits de l’homme, à la corruption ou à la violence », a déclaré Natasha White, chargée de campagne à Global Witness. « Le devoir de diligence se réfère aux étapes que les entreprises doivent suivre pour identifier et gérer en toute transparence les problèmes qui surgissent dans leurs chaînes d’approvisionnement. Il s’agit d’un moyen par lequel elles s’efforcent du mieux qu’elles le peuvent de ne pas contribuer à ce type de préjudices tout en continuant à s’approvisionner en minerais provenant de zones à haut risque de manière responsable. » 

L’étude relève que 70 pour cent des sociétés exportatrices au Rwanda ont publié un rapport, 45 pour cent dans l’est du Congo et aucun en Ouganda. Aucune firme n’avait publié de rapport avant 2014 ; il en ressort donc que des progrès ont été opérés mais le chemin à parcourir est encore long. 

Pour l’ensemble des trois pays, près de 75 pour cent des entreprises qui ont publié un rapport ont omis de mentionner un quelconque risque rencontré dans leur travail ou la manière dont elles l’ont géré. Dans le cas de certaines de ces firmes, Global Witness a mis au jour des incidents majeurs non signalés survenus dans leurs chaînes d’approvisionnement. 

« Les rapports sur le devoir de diligence sont à la fois un vecteur de partage d’informations sur les risques encourus tout au long de la chaîne d’approvisionnement et un mécanisme essentiel pour s’assurer que toutes les entreprises qui tirent profit de ces minerais s’attellent à gérer les problèmes auxquelles elles sont associées », a expliqué Natasha White. « C’est la façon honnête et responsable de faire des affaires ; si les profits sont partagés tout au long de la chaîne d’approvisionnement, la responsabilité devrait l’être également », a-t-elle ajouté.

Sur le plan de la qualité des rapports, le Congo est sorti gagnant. Six sociétés basées au Congo ont fait preuve de transparence en divulguant au moins un risque associé à leurs activités, contre une seule au Rwanda. Aucune des entreprises ougandaises sur lesquelles s’est penchée notre étude n’a publié de rapport, ce qui démontre que le pays accuse un sérieux retard en termes d’efforts visant à promouvoir un approvisionnement responsable en minerais.

« Trop d’entreprises ont rédigé des rapports généraux d’une page évoquant ce qu’elles s’engagent à faire plutôt que ce qu’elles ont déjà fait. Les sept firmes qui ont pris des mesures pour signaler les risques marquent le début d’un changement dont le secteur des minerais de la région a cruellement besoin », a noté Natasha White.

Global Witness a suivi la trace des minerais depuis les entreprises basées au Congo pour remonter à six négociants internationaux basés en Malaisie, à Hong Kong, en Belgique, au Luxembourg et au Rwanda. Les rapports de certaines de ces sociétés étaient encore moins détaillés que ceux des exportateurs, en dépit de leur taille et de leurs ressources. De là, ces minerais auront été utilisés en électronique, en joaillerie et dans des industries partout à travers le monde.

Le secteur aurifère des Grands Lacs est particulièrement à haut risque, et pourtant il se retrouve à l’arrière du peloton en ce qui concerne la publication de rapports sur l’exercice du devoir de diligence. L’or est un produit à valeur élevée qui peut facilement être exporté en contrebande et négocié en petites quantités. Global Witness estime que 94 pour cent de l’or du Congo a quitté le pays illégalement en 2014. Seule une des 18 compagnies officiellement enregistrées comme opérant dans le secteur aurifère de la région en 2015 a publié un rapport pour l’année concernée.

 Voici quelques recommandations clés :

  • Toutes les entreprises opérant au Congo, au Rwanda et en Ouganda ou s’approvisionnant en minerais provenant de ces pays devraient exercer leur devoir de diligence et publier un rapport à ce sujet. Au Congo et au Rwanda, il s’agit d’une obligation légale.
  • Toutes les entreprises devraient améliorer la qualité de leurs rapports. Elles devraient en particulier inclure davantage de détails sur les risques identifiés et sur la façon dont elles y ont géré par des réformes ou des mesures tangibles.
  • Le Congo, le Rwanda et l’Ouganda devraient contrôler les efforts en matière de devoir de diligence et de rapports fournis par les firmes qui relèvent de leur juridiction et – dans le cas du Congo et du Rwanda – sanctionner celles qui ne se conforment pas à la loi.
  • L’Ouganda devrait honorer les engagements internationaux qu’il a pris en 2010 de s’assurer que les sociétés qui opèrent dans son ressort territorial ou relèvent de sa compétence juridictionnelle exercent leur devoir de diligence et publient un rapport à ce sujet. Il devrait adopter une loi sur le devoir de diligence dans les plus brefs délais, comme le Congo et le Rwanda l’ont déjà fait.

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Infos pour les journalistes:

  • Ce rapport se concentre exclusivement sur les entreprises qui étaient officiellement enregistrées comme exportatrices de quatre minerais – l’étain (cassitérite), le tantale (coltan), le tungstène (wolframite) et l’or (aussi appelés les « 3TG ») – provenant de l’est du Congo (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri, Maniema et Tanganyika), du Rwanda et de l’Ouganda en 2015. L’échantillon de firmes analysées était basé sur les listes officielles d’exportateurs 2015 fournies par les autorités minières provinciales de l’est du Congo et les autorités minières nationales du Rwanda et d’Ouganda. Ce rapport est axé sur quatre minerais – les « 3TG » –  mais le Guide OCDE a une portée globale et toutes les entreprises qui achètent, vendent ou traitent des minerais devraient exercer un devoir de diligence sur leurs chaînes d’approvisionnement, quel que soit le type de minerai. Pour la méthodologie complète de Global Witness, voir annexe 1 de « L’heure de creuser plus profondément ».
  • La norme reconnue internationalement en matière d’exercice du devoir de diligence appliqué à la chaîne d’approvisionnement, le « Guide OCDE sur le devoir de diligence pour des chaînes d’approvisionnement responsables en minerais provenant de zones de conflit ou à haut risque », est disponible sur: http://www.oecd.org/daf/inv/mne/OECD-Due-Diligence-Guidance-Minerals-Edition3.pdf
  • 3. Pour la loi congolaise relative au devoir de diligence appliqué à la chaîne d’approvisionnement, Arrêté ministériel no. 0057 CAB.MIN/MINES/01/2012 du 29 février, voir http://mines-rdc.cd/fr/documents/Arrete_0057_2012.pdf. Pour la loi rwandaise relative au devoir de diligence appliqué à la chaîne d’approvisionnement, Instructions ministérielles No. 002//2012/MINIRENA of 28/03/2012 sur le mécanisme de certification régional des minerais, voir http://www.minirena.gov.rw/fileadmin/Mining_Subsector/Laws__Policies_and_Programmes/Laws/5.Ministerial_Regulation___Regional_Certification_Mechanism_for_Minerals.pdf.  
  •  En 2010, le Congo, le Rwanda et l’Ouganda – ainsi que huit autres États de la région – ont signé la ‘Déclaration du sommet spécial de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL) sur la lutte contre l'exploitation illégale des ressources naturelles dans la région des Grands Lacs’ (Déclaration de Lusaka). Par cet acte, ils ont officiellement avalisé le Guide OCDE sur le devoir de diligence et se sont notamment engagés à faire du devoir de diligence appliqué à la chaîne d’approvisionnement une obligation sur leur territoire. Pour une copie de la Déclaration de Lusaka, voir https://www.oecd.org/fr/daf/inv/mne/47143509.pdf

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