Communiqué de presse / 7 Octobre 2010

Global Witness salue l'arrestation d'un dirigeant rebelle congolais pour des viols commis en masse

L’enquête doit également porter sur le rôle des ressources naturelles

Global Witness a salué l’arrestation cette semaine d’un commandant rebelle, le Lieutenant Colonel Sadoke Kokunda Mayele, accusé d’avoir coordonné une série d’attaques brutales dans l’est de la République démocratique du Congo, au cours desquelles au moins 303 personnes ont été violées. De récentes enquêtes de l’ONU ont démontré l’existence de liens étroits entre ces attaques et la compétition pour les zones minières locales.

Le parquet militaire congolais a ouvert une enquête. Global Witness demande que cette enquête clarifie les liens existant entre les violences et la lutte pour le contrôle des ressources en minerais dans la région. D’autres commandants impliqués dans les attaques devraient aussi être arrêtés et faire l’objet d’une enquête.

Selon l’ONU, les FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) ont uni leurs forces à celles de deux groupes rebelles plus petits pour attaquer 13 villages du territoire de Walikale, dans le Nord-Kivu. Les attaques se sont produites entre le 30 juillet et le 2 août. Au moins 303 femmes, hommes et enfants ont été violés, mais ces chiffres pourraient être revus à la hausse car la moitié de la population était toujours cachée dans la forêt lors des enquêtes de l’ONU. Plus de 100 civils ont par ailleurs été enlevés pour servir de main d’œuvre forcée.

Mayele, chef d’état-major de l’un des plus petits groupes rebelles, les Maï Maï Cheka, a été arrêté mardi dans le territoire de Walikale après avoir été livré aux casques bleus de l’ONU et aux troupes congolaises.

« Nous nous réjouissons de son arrestation et de l’ouverture d’une enquête », a déclaré Emilie Serralta, chargée de campagne sur le Congo à Global Witness. « Il est vital que ceux qui ont orchestré cette campagne d’une violence inouïe soient traduits en justice. Le parquet militaire, avec l’assistance de la communauté internationale, doit garantir une enquête indépendante et approfondie, dont l’un des volets doit permettre de comprendre le rôle joué dans ces attaques par les ressources en minerais. »

Une équipe de l’ONU qui s’est rendue dans la région peu de temps après les attaques a rapporté que le village le plus affecté, Luvungi, avait constitué une cible majeure en raison de son rôle de centre minier. Dans un rapport confidentiel dont Global Witness a pris connaissance, l’équipe a également déclaré que les « villages attaqués étaient vulnérables car tous les soldats des FARDC [ l’armée congolaise] sont partis en juillet 2010 pour participer à des opérations militaires ‘lucratives’ dans la zone minière d’Omate et de Bisie. »

Un rapport séparé, publié conjointement le 24 septembre par la force de maintien de la paix de l’ONU (MONUSCO) et le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, souligne que « les autorités administratives locales et les militaires des FARDC …, animés par l’appât du gain, » collaborent avec les groupes rebelles. Il réaffirme que les militaires avaient laissé les civils sans protection pour servir leurs intérêts financiers personnels dans le commerce des minerais.

« L’exploitation des mines par des groupes armés leur permet de financer leurs mouvements », précise le rapport.

Global Witness appelle le gouvernement congolais à veiller à ce que l'armée ne soit en aucun cas impliquée dans l'extraction et le commerce de minerais ou l'extorsion liée au commerce de minerais. Des enquêtes devraient être ouvertes et des poursuites engagées à l'encontre des membres de l'armée qui sont impliqués dans ces activités illégales. Des moyens devraient être donnés aux casques bleus de l'ONU pour apporter efficacement leur soutien au gouvernement dans ses efforts pour réduire l'implication des militaires dans le commerce de minerais.

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Contacts :

Emilie Serralta : +44 207 492 5855, Amy Barry +44 7980 664397

Notes à l’intention des rédactions :

1. Les FDLR constituent un groupe composé principalement de Hutus rwandais, dont certains dirigeants auraient participé au génocide de 1994 au Rwanda.

2. Pour tout renseignement complémentaire sur les liens entre les atteintes constantes aux droits de l’homme et le commerce des minerais dans l’est du Congo, consulter les documents suivants :

  • Communiqué de presse de Global Witness, « RD Congo : les anciens rebelles s’emparent de l’activité de racket du commerce de minerais », 11 mars 2010, téléchargeable ici.
  • Rapport de Global Witness, « ‘Face à un fusil, que peut-on faire ?’ La guerre et la militarisation du secteur minier dans l’est du Congo », juillet 2009, téléchargeable ici.

3. ‘‘Monusco-Goma, Kibua joint Protection Team Report, 13-17 August 2010’’. Global Witness a pris connaissance de ce rapport confidentiel.

Monusco and UNHCHR, “Rapport préliminaire de la mission d’enquête du Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l’Homme sur les viols massifs et autres violations des droits de l’homme commis par une coalition de groupes armés sur l’axe Kibua-Mpofi, en territoire de Walikale, province du Nord-Kivu, du 30 juillet au 2 août 2010”, 24 September 2010. Ce rapport est téléchargeable ici.